CIVISME ET ENVIRONNEMENT
Les destructions et les dommages causés à l’environnement, tels que le réchauffement du climat, la dégradation de la couche d’ozone, la désertification, la disparition d’espèces animales et végétales, l’exploitation déraisonnable des ressources naturelles et la pollution sont le résultat d’activités humaines.Ce sont nos modes de production et de consommation qui sont à l’origine de la dégradation de l’environnement. Sans aller jusqu’à dire que la solution consiste à supprimer l’homme, il n’en est pas moins urgent de chercher comment modifier les attitudes et les comportements humains et pour cela, faut-il convaincre ou contraindre ?
CONTRAINDRE
Moins de 10% des gens sont respectueux des lois par vertu et il est donc nécessaire d’exercer un minimum de contrainte sur les individus. Ceux-ci s’adaptent à leur environnement. Trois éléments sont susceptibles de peser sur les comportements : l’Etat, le marché et l’opinion publique.
• Pressiondel’Etat:
Il faut pour cela que l’Etat se dote d’un arsenal législatif complet, ce qui n’est pas encore le cas dans les pays en développement, les plus vulnérables et ceux pour qui les contraintes économiques sont les plus lourdes. Ce travail d’actualisation des lois et des règlements est cependant en cours, mais le plus important en la matière est d’avoir la volonté politique, et la capacité, de les faire appliquer, si imparfaits soient-ils (principe du pollueur payeur).
• Pressiondumarché:
La préoccupation environnementale est devenue un enjeu économique pour l’entreprise, au même titre que la qualité et le label vert est devenu une condition d’accès à certains marchés et un critère de décision de l’acheteur. Pour l’entreprise, il s’agit donc d’être écologiquement sûre de la conception du produit jusqu’à sa mort. Le seul marketing vert ne suffit pas et doit s’effacer devant la certification environnementale concernant tout le cycle de vie du produit.
Face à ces nouvelles exigences, l’entreprise peut réagir de manière variable :
Certaines se contentent du minimum pour être en conformité avec la réglementation en vigueur, effrayées par les investissements qu’implique cette nouvelle dimension et les changements de mentalité qu’elle suppose. Ces entreprises réagissent à l’égard de
l’environnement comme à l’égard de la démarche Qualité. Elles s’exposent à être toujours en retard d’une norme ou à voir leur activité un jour compromise.
D’autres adoptent d’emblée une attitude volontariste en développant une culture environnementale dont elles vont en outre recueillir des avantages d’ordre économique (les process moins polluants sont aussi plus performants), vis-à-vis de la concurrence et aussi en terme d’image.
• Pressiondel’opinionpublique
En dépit de l’intérêt évident des entreprises et des Etats à intégrer l’environnement dans leurs préoccupations et en dépit des déclarations d’intention, sur le terrain la réalité est bien souvent différente.
Si pour certaines entreprises, respecter les consommateurs et l’environnement est un devoir, d’autres ne sont vertueuses que sous la pression de l’opinion publique qui peut menacer à terme la survie d’une activité ou d’un produit. C’est ainsi qu’un produit peut être boudé, voire boycotté par la clientèle et que le label écologique peut déterminer le choix de l’acheteur.
C’est le cas de Shell avec qui les mouvements écologistes (dont Greenpeace) ont engagé un bras de fer au sujet du démantellement d’une plateforme de forage en mer du Nord et qui n’a fait machine arrière que lorsque ses clients allemands ont boycotté ses stations service. A noter qu’au Nigeria où l’opinion publique ne peut s’exprimer comme en Allemagne, cette même multinationale continue impunément de saccager l’environnement et de causer de graves nuisances aux riverains de ses installations.
On voit par là le poids des ONG, de la société civile et de l’opinion publique sur le comportement des entreprises.
CONV AINCRE
Si la contrainte est indispensable, elle a cependant des limites et on ne peut construire le développement durable et protéger l’environnement sans l’adhésion d’une majorité de la population.
Le profil du pollueur est variable : certains polluent par indifférence au problème, d’autres le font sciemment avec cynisme, d’autres encore par ignorance, d’autres enfin par insouciance. Il faut donc adapter les messages à ces différents types de comportement, afin de susciter l’éveil d’une conscience individuelle et collective. Or cette conscience ne se décrète pas, elle est le fruit d’une éducation à la responsabilité citoyenne. Qui se charge de faire de nous des citoyens responsables ?
• La famille, traditionnellement chargée de transmettre les valeurs fondamentales, joue de moins en moins son rôle ; qu’ils soient riches ou pauvres, mais pour des raisons différentes, ce ne sont plus les parents qui éduquent les enfants.
• L’école a pour mission de former la personne, le travailleur et le citoyen utile pour son pays. Il semble toutefois que le système éducatif ait perdu de vue cette mission pourtant essentielle.
• L’appareildel’Etat,parsavaleurd’exemplarité,sedoitplusquetoutautrededonner l’exemple du civisme. En effet, comment pouvons-nous prêcher la vertu à nos entrepreneurs quand des administrations ne respectent pas leurs engagements ? Comment inciter le citoyen au respect des règlements quand il a sous les yeux des exemples d’infractions venant de l’appareil même de l’Etat ou des élus qui ne sont même pas sanctionnés ?
• Les partis politiques, par l’intermédiaire desquels s’exprime l’opinion des citoyens, ont à charge de diffuser une culture politique, seule à même de permettre au citoyen d’exercer ses droits et devoirs dans la cité. Ils ont un devoir de pédagogie essentiel pour l’édification d’une démocratie réelle.
• L’entreprise, formidable moyen d’intégration dans la société, ne peut plus se contenter de produire de la richesse et surtout pas à n’importe quel prix. Elle doit désormais pour assurer sa compétitivité contribuer à la formation de ses employés, au maintien de la cohésion sociale, tout en veillant à préserver l’environnement. Elle peut contribuer au développement en soutenant les actions d’éducation et de sensibilisation de la population ; de même elle peut participer à l’amélioration du cadre de vie.
• Les médias enfin dont le rôle ne se borne pas à l’information des citoyens ou à leur divertissement. Dans un pays comme le nôtre qui compte une forte proportion d’analphabètes, la radio et la télévison pourraient nous faire gagner un temps précieux en matière d’éducation fonctionnelle. Même la publicité, dans ce cadre, a un rôle important à jouer en intégrant dans les messages qu’elle véhicule des valeurs non marchandes. Il est certes difficile d’influer sur le comportement et les mentalités, mais on ne se pose pas la question quand il s’agit de faire adopter un boisson ou une lessive, même par une population analphabète. Il est remarquable de constater que les campagnes institutionnelles concernant des causes d’intérêt national sont extrêmement rares par rapport à celles qui visent à modifier les habitudes de consommation (5 ou 6 seulement sur 100 spots télévisés diffusés en 1994).
• Les ONG sont sous une autre forme le lieu d’expression et de mise en pratique de la citoyenneté.
AFAK, pour sa part, se propose de contribuer à ce travail d’éducation et d’éveil des
consciences et s’est fixé comme objectifs :
– de promouvoir des attitudes citoyennes et des comportements favorables au
développement,
- – de combattre les comportements nuisibles au développement,
- – d’aider à réhabiliter les valeurs éthiques et morales.LE ROLE D’AFAK L’association a mené un certain nombre d’actions de sensibilisation et de terrain en direction de 4 publics cibles :
- – l’école,
- – le grand public,
- – l’entreprise,
- – les communes.
1. L’école
• Dans le cadre d’un partenariat avec le MEN, l’association a élaboré un programme d’éducation civique, dont le support-clé est le Passeport du Petit Citoyen édité en Arabe et en Français et destiné à terme à être diffusé à 4 000 000 d’écoliers du cycle fondamental.
• Un concours «Améliorons l’environnement de notre école» a été organisé en 1997 avec la participation de 250 écoles.
• Des conférences sur le civisme et la citoyenneté sont données dans plusieurs collèges et lycées et des établissements d’enseignement supérieur.
• Près de 10 conventions de partenariat sont signées avec des établissements d’enseignement et des associations de parents d’élèves.
2. Le grand public
• Chaque année, l’association mène une campagne nationale sur le thème «Une ville propre, c’est l’affaire de tous» comportant des actions de terrain et de sensibilisation. AFAK a incité ainsi la création de près de 50 associations de quartier.
• Programme radiophonique d’éducation à la citoyenneté : commencé en 1998, ce programme repose sur la diffusion quotidienne de spots radiophoniques en Arabe dialectal sur Radio Méditerranée Internationale. Chaque thème est développé pendant 3 semaines à raison de 3 passages par jour. Parmi les thèmes abordés : droits et devoirs du citoyen, corruption, respect des autres, responsabilité citoyenne, droits de la femme, scolarisation des petites filles, environnement etc. Ce programme a été financé pendant un an par l’Union Européenne, puis par diverses institutions marocaines.
• Programme radiophonique de développement du monde rural : démarré en 1999 avec la Caisse Nationale de Crédit Agricole, il vise à sensibiliser les populations rurales aux problèmes de développement, de santé et d’éducation et à promouvoir une culture
associative.
• Sondages d’opinion en partenariat avec l’Economiste sur les élus et les attentes des citoyens, les Marocains face au XXIème siècle.
• Conférences, débats télévisés et émissions radiophoniques visant à promouvoir le civisme.
3. Les communes
Pour aider les communes à mieux satisfaire les attentes de citoyens, l’association apporte un soutien technique à plusieurs communes dans le cadre de conventions de partenariat. Un guide de gestion des communes (Qualité de la Vie, Qualité de la Ville) édité à 4 000 exemplaires a été diffusé à la plupart des responsables communaux.
4. L’entreprise
Afin d’améliorer la qualité des produits et services, AFAK a organisé la première campagne nationale de sensibilisation aux enjeux de la qualité (avril 1997), avec spots télévisés et radiophoniques, édition d’un guide de la Qualité et d’une brochure Qualité (40 000 exemplaires), ainsi que d’affiches sur la qualité. Cette campagne a été le point de départ de l’organisation par les pouvoirs publics de la Semaine Nationale de la Qualité. • Edition de deux ouvrages «Paroles de Managers» et «Réussir la Qualité» à l’intention des cadres des entreprises.
• FormationdessalariésdequelquesentreprisesàlaQualité.
PERSPECTIVES ET DIFFICULTES
Les besoins en matière d’éducation de la population aux droits de l’homme, à la citoyenneté, au respect de l’environnement et à la qualité du travail sont considérables et sont à la base de tout processus de développement durable. Ce travail d’éducation nécessite la mise en œuvre de véritables programmes éducatifs utilisant les mass media qui, à défaut d’être menés par le gouvernement, pourrait être réalisés par les ONG sous réserve d’en trouver le financement.
Pour ce faire les ONG telles qu’AFAK peuvent recourir aux sources suivantes :
• Le sponsoring : en faisant jouer l’argument de la publicité citoyenne ; mais cette source de financement reste limitée, peu d’entreprises ayant la possibilité d’investir dans cette direction.
• L’Etat dont c’est la mission d’éduquer les masses ; mais là aussi les possibilités sont très limitées et n’ont que pu que très rarement être mises en œuvre.
• Restent les organismes internationaux dont les procédures sont souvent très longues et très contraignantes.